Le crowdfunding : en manque de cadre juridique

Le crowdfunding, mode de financement en plein essor, permettant de récolter des fonds auprès d'un large public en vue de constituer un financement participatif d’un projet « citoyen », ne dispose pas encore d’une reconnaissance juridique propre ni cadre juridique sécurisé.

Le crowdfunding (de « crowd » la foule et « funding » financement) n’a pas de définition juridique. Ce nouveau mode de financement permet de récolter des fonds, généralement des petits montants, auprès d'un large public en vue de financer un projet créatif, culturel (voyage humanitaire, musique, film, ,…) ou entrepreneurial (en matière de protection de l’environnement, du développement des énergies renouvelables…). Il diffère des méthodes de financement traditionnel et intègre souvent une forte dimension affective. Tandis qu’en France aucune réglementation n’est clairement établie sur le sujet, les USA ont, eux, mis en place le JOBS Act.

Parce que les autres formes de financement traditionnel étaient absolument inaccessibles, certains porteurs de projets ont opté pour un mode de financement plus démocratique ou « citoyen ». Aujourd’hui, on assiste à un tournant dans le secteur du crowdfunding, non seulement en France, mais aussi au niveau mondial. Le financement participatif est donc un levier qui permet au grand public de soutenir financièrement et collectivement une idée ou un projet qui le séduit, comme par exemple dans les énergies renouvelables. Même si ces levées de fonds citoyennes ne sont pour le moment qu'une goutte d'eau, le secteur est en pleine croissance.

Il existe différentes catégories de plateformes de financement en matière de crowdfunding. Elles peuvent ainsi être basées sur des dons, des prêts ou des investissements en fonds propres, on trouve ainsi les plates-formes de crowdfunding permettant de récolter des dons ou des contributions pouvant donner lieu à des contreparties diverses ; les plates-formes de crowdfunding permettant le financement de projets via des prêts à titre gratuit ou rémunéré (peer to peer lending) ; et les plates-formes de crowdfunding permettant le financement d’un projet entrepreneurial via la souscription de titres (actions ou obligations convertibles en actions ou non, l’investisseur acquiert alors des titres de capital ou de créance émis par l’entreprise ainsi soutenue).

Les formes principales de ces investissements participatifs peuvent être : une participation directe au capital de la SPV ou la souscription d’obligations émises par cette dernière, cette solution supposant toutefois que les montants en jeu restent en-deçà des seuils d’application de la réglementation sur l’offre au public de titres financiers ; ou encore, une intervention plus indirecte, en « amorçage » du financement bancaire, au moyen d’un apport d’épargne dédié et rémunéré permettant de garantir le financement du projet ou simplement d’en réduire le coût.

Si le crowdfunding à proprement parler n’existe pas dans la réglementation française, il est néanmoins soumis à la réglementation financière du Code Monétaire et Financier, sauf s’il en est exempté (les plateformes solidaires peuvent notamment bénéficier d’exemptions assez larges).

C’est pourquoi le président de la République a annoncé le 29 avril dernier, lors de la clôture des Assises de l’Entrepreneuriat, l’établissement d’un cadre juridique sécurisé pour le déploiement de la finance participative en France, le Gouvernement devant faire dès septembre 2013 des propositions pour construire un cadre favorisant l’essor de ce nouveau mode de financement des projets.

D’autre part, différents groupes de travail ont été constitués, notamment au sein de l’association PME-Finance, qui a entrepris la consultation des différents acteurs et qui propose la création d’un statut d’établissement de financement participatif. Des négociations au niveau européen sont aussi en cours, en vue d’inventer un modèle européen, qui pourrait s’inspirer ou non du modèle américain.

Dans l’intervalle, et afin de favoriser dès maintenant le développement ce type de financement, l’AMF et l’ACP ont rédigé deux guides (un, destiné au grand public, l’autre, aux plates-formes et aux porteurs de projet) permettant d’apprécier les règlementations applicables à ce jour en fonction des modalités choisies.

Les donateurs doivent en tout état de cause prendre conscience des risques encourus, et se renseigner sur la nature de l’opération avant de s’engager, ainsi que sur les obligations pesant sur la plate-forme de crowdfunding.

Reste qu’un problème de fraude peut se poser quant à l’utilisation de ces plateformes ce qui représente un risque qu’il convient d’apprécier, en ce qu’elles pourraient permettre de détourner l’argent des donateurs, ou mal l'utiliser. En attendant la mise en place d’un régime juridique adapté au crowfunding, il faut donc se référer à la réglementation complexe d’activités telles que la fourniture de services d’investissement, ou l’offre au public de titres financiers, la réalisation d’opérations de banque et la fourniture de services de paiement.