Paritarisme et architectures institutionnelles : où en sommes-nous ?

Paritarisme

À l’heure où le gouvernement semble avoir préparé son modèle cible de branches professionnelles, les partenaires sociaux, qui ont jusqu’au 30 septembre 2018 pour conclure des conventions de fusion de branches, semblent avoir la tête ailleurs…

Et pour cause : s’il est facile et récurrent de blâmer les syndicats salariés pour leur entêtement et les syndicats patronaux pour leur distance altière, ces derniers font face à plusieurs enjeux majeurs qui s’avèrent être des défis de taille.

L’organisation des confédérations

Chaque confédération syndicale, patronale ou de salariés, présente des spécificités institutionnelles. Il y a d’ailleurs autant de modèles que de confédérations.

La puissante organisation des TPE et PME, l’U2P, par exemple, se présente comme une « holding » politique de quatre confédérations autonomes : UNAPL, CGAD, CNAMS et CAPEB. Le MEDEF, quant à lui, se présente comme un ensemble plus structuré d’apparence, avec un siège fort et des relais locaux, en principe, fidèles.

Une limite apparaît néanmoins, notamment dans le cas des conflits d’intérêts de la Fédération française de l’assurance (FFA), lorsque le MEDEF est représentant dans des organismes paritaires d’assurance, ou encore lors des manœuvres politiques initiées par l’Union des Industries et Métiers de la Métallurgie (UIMM) au sein du mouvement.

Ainsi, le MEDEF, et Force Ouvrière (FO), se sont dernièrement illustrés dans le cadre du dossier Arpège Prévoyance, en Alsace. Dans cette affaire, les représentants MEDEF et FO de l’institution interprofessionnelle ont refusé de suivre la ligne politique de la confédération pour organiser leur « royaume local ». Le MEDEF a alors été incapable d’assurer une cohérence de vue entre Paris et l’Alsace ni de prendre de décisions pour protéger l’intégrité d’un paritarisme efficient et serein.

L’organisation des jeux de mandat entre confédérations titulaires des droits de négociation et de représentation est un chantier juridique à ouvrir, au moment où le paritarisme subit les dégâts d’un opprobre public soutenu et alimenté par le pouvoir en place.

Les nouvelles règles de représentativité

De 2004 à 2014, trois lois sont venues modifier en profondeur les grands principes de représentativité syndicale héritée de l’après-guerre. Après des décennies où cinq syndicats de salariés et trois patronaux s’étaient vus reconnaître une « représentation de droit », chaque syndicat doit aujourd’hui prouver qu’il est représentatif du champ dans lequel il s’exprime.

La conséquence la plus concrète réside dans les enjeux de détachements de salariés. Les résultats aux élections professionnelles déterminent en effet la quotité d’ETP détachables dans les syndicats et au service du dialogue social, et de financement. Ainsi, certains secteurs professionnels sont de grands apporteurs de postes détachés et de financement, comme les transports ou la fonction publique. Aussi, certaines fédérations ou sections locales pourraient être tentées de vendre leur trésor politique à des confédérations plus ouvertes afin de leur donner davantage de poids. 

La défense du paritarisme

Aujourd’hui, l’inertie des syndicats laisse place nette aux pourfendeurs du modèle paritaire. Pourtant, le paritarisme gère plus de 6 % du PIB français en assurance, formation professionnelle, emploi, santé, logement… avec succès ! En effet, les organismes paritaires ont bien souvent pour concurrents de grands groupes internationaux, et ne décrochent pas pour autant de la compétition.

L’ère Macron a ouvert une nouvelle dynamique. Le veto syndical n’effraie plus. Les syndicats ne s’opposent plus. La réforme de la formation professionnelle, en mépris total de l’accord national interprofessionnel longuement négocié entre les partenaires sociaux, se pose comme un avatar illustrant cette nouvelle ère. Les partenaires sociaux sont les marionnettes instrumentalisées de leur propre inertie. L’enjeu de la définition des branches professionnelles risque bien d’être un bras de fer perdu d’avance, alors que, en février 2018, Muriel Pénicaud avançait, sans trop d’affection, qu’il fallait supprimer les corps intermédiaires.

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