France : la situation législative des artistes musicaux du web

A Bruxelles, la directive sur la gestion collective des droits musicaux est en négociation, pour une politique de marché unique et une plus grande transparence dans la gestion des revenus.
Comment les artistes musicaux du web font-ils pour continuer à exister aujourd'hui ? La situation législative actuelle leur est-elle favorable ?

Aujourd’hui être un musicien utilisant le web comme plateforme de développement est un véritable parcours du combattant.

Diffuser sa musique en ligne, n’est pas gage de réussite

Avec 25 000 musiciens répertoriés en France par le Ministère de la Culture, être artiste web c’est se perdre dans une foule au moins 10 fois plus nombreuse d’amateurs-musiciens. Par ailleurs, les labels et récompenses nationales ont délaissé des pans entiers du paysage musical Français en ne reconnaissant pas certaines niches ou certain styles.

Faire de nombreuses vues sur les plateformes de musique online ne facilite forcément pas la rémunération de l’auteur

Bien que les sites de streaming musicaux clament haut et fort que leurs abonnements servent à payer les artistes, il s’avère que la rémunération est très faible. Quant à Youtube, il rémunère 0,00058€ la vue. De fait, les artiste web tirent leurs revenus très souvent et uniquement des publicités. LAST.FM, plateforme de streaming musicale, demande 1 546 667 écoutes pour gagner environ  1 161 dollars. Cela paraît énorme mais c’est finalement peu si l’on compare avec d’autres sites tels que SPOTIFY qui nécessite pour la même somme,  4 055 110 écoutes.

Signer avec une « major » ne garantit pas la protection de sa production musicale

Les « major » sont les labels les plus importants de musique Universal, EMI (bien que racheté par Universal), Sony Music Entertainment, se partagent l'essentiel du marché mondial (plus de 77 % en 2004).

Ce que ceux-ci font souvent aux petits musiciens du web, c’est de voler leurs productions musicales. Je reçois régulièrement les doléances de musiciens (demarchés par des majors, dont le contrat n'aboutit jamais) à qui les labels ont commandé un morceau et qui ont eu la surprise de voir leur création « remixée » et être mise en vente sur le marché musical,  sans qu’aucun droit ne leur soit versé.

Rare sont les artistes qui songent à se protéger. Le fait de partager une musique dont on n’est pas l’auteur, sur un site de streaming n’est pas légalement recevable. Déposer une musique à la SACEM ou toute autre société de gestion collective de droits musicaux est couteux et compliqué : il faut au moins 5 titres avec un enregistrement clair et des partitions écrites. Il faut également justifier de l’exploitation de celles-ci, déclarer des représentations sur l’année et verser une somme à l’organisme.

Les Creative Commons (CC) est une organisation à but non lucratif dont l’objectif est de proposer une solution alternative légale au dépôt en société de gestion collective. Quelques contraintes persistent. Bien que la diffusion des œuvres musicales dans les soirées soit un vecteur de visibilité, si l’artiste est adhérent à la CC, sa musique ne pourra pas être jouée dans une soirée ou un concert où une participation aux frais est demandée.

La SACEM n’assure pas un revenu régulier à l’artiste web

Deux tiers des adhérents n’ont pas reçu d’argent de la part de la SACEM en 2011 et seulement 1% ont touché l’équivalent d’un SMIC.

Que va changer la future loi concernant la politique de marché unique ?

La directive sur les sociétés de gestion collectives de droits musicaux en négociation à Bruxelles a pour objectif de clarifier les marges et la gestion des fonds de celles-ci. De plus, la question de la rémunération des artistes et des dirigeants musicaux fait débat : en France, le directeur général de la SACEM est rémunéré 400 K€ annuels et les 8 salaires le plus élevés  au sein de l’organisme sont de 270 K€.

Etre un artiste musical du web

Même si la législation essaye au maximum de protéger les musiciens, il reste beaucoup à améliorer. Ici n’a été abordé que les points fondamentaux de la législation musicale, mais l’impossibilité de déclarer des cachets sur une diffusion de concert uniquement en ligne qui aurait généré beaucoup de vue est un facteur tout aussi important.
Actuellement, le système législatif et l’administration permettent l’existence d’artistes web, cependant, il ne dispose pas de solutions convaincantes pour le lancement et le développement numérique de ceux-ci.