Prothèses PIP : retour sur l’affaire des implants mammaires

Jeudi. La réponse de la chambre de l’instruction de la cour d'appel d'Aix-en-Provence aura lieu jeudi, pour une nouvelle demande de remise en liberté du fondateur de la société des prothèses mammaires PIP, Jean-Claude Mas, incarcéré depuis mars 2012.

 

En détention provisoire dans la prison du Pontet à Avignon, l’avocat général a requis son maintien en détention,estimant des risques de fuite de M. Mas. En effet, il se serait ouvert à un co-détenu de la prison marseillaise des Baumettes, où il fut d'abord détenu, évoquant un projet de fuite en Amérique latine où il disposerait de plusieurs millions d'euros placés notamment au Costa Rica, en Colombie, au Vénézuela et au Nicaragua.

Selon l’avocate des parties civiles, Me Ravaz, « la seule chose qu'il regrette, c'est de ne pas avoir pu s'enfuir en Amérique du Sud. »L’homme, âgé de 72 ans, a eu des mots très durs pour les victimes. Lors des procès, il neremet jamais en cause l’utilisation de son gel et affirme « Je savais que ce gel n'était pas homologué, mais je l'ai sciemment fait car le gel PIP, rapport qualité-prix c'était moins cher. »

Retour sur une incroyable supercherie.

Environ 30.000 femmes en France et 500.000 dans le monde, portent les fameuses prothèses défectueuses, de la société PIP (Poly Implant Prothèse), basée àLa Seyne-sur-Mer dans le Var. En Amérique du Sud ou en Europe de l’Est, pas un jour ne passe sans que des femmes se palpent la poitrine pour s’assurer du bon maintien de leurs implants. Toutes s’inquiètent de la moindre grosseur, signe d’irritation ou de dispersion du produit dans le corps.80 % d'entre elles ont été opérées pour des raisons esthétiques et non médicales.

Le 30 mars 2010, l’alerte est donnée. L’Afssaps (Agence française de sécurité sanitaire, renommée ANSM) annonce le retrait des prothèses PIP du marché. Le taux anormal de ruptures et l’utilisation d’un gel différent de celui déclaré, conduisent à la liquidation judiciaire le jour même du troisième exportateur mondial d’implants mammaires. Les porteuses sont appelées à consulter leur chirurgien.

 

En juillet, plus de 500 plaintes au civil sont déposées. Allianz, l’assureur de PIP, dépose également un recours en justice. Le parquet de Marseille ouvre une enquête préliminaire pour « tromperie aggravée et mise en danger de la vie d’autrui. »

Le ministère de la santé s’engage à prendre en charge les frais d’explantation des prothèses, ainsi que leur remplacement s’il s’agit de reconstruction mammaire après un cancer, le 29 septembre 2010.

En novembre, l’association PPP (Association de défense des porteuses de prothèses de la marque PIP) porte plainte contre l’organisme allemand TÜV qui avait certifié le gel utilisé dans les implants.

Un an plus tard, le 21 novembre 2011, signe le premier décès d’une femme, à Marseille, ayant développé un lymphome après la rupture de ses prothèses.

Un juge d’instruction se charge de l’information judiciaire contre X pour blessures et homicide involontaires, le 8 décembre 2011. Cette enquête s’ouvre à la suite du dépôt de plainte de la mère d’une porteuse d’implants PIP, décédée d’un cancer.Le jour même est mis en place un comité de suivi, réunissant autorités sanitaires, professionnels de santé et associations de patients. 

Huit cas de cancers sont signalés au 23 décembre. Les autorités recommandent aux porteuses de se faire retirer leurs prothèses à titre préventif. Des « risques bien établis » de « ruptures » et de « réactions inflammatoires » sont à craindre. Le brésil, la Finlande et l’Italie invitent les femmes porteuses des implants PIP à consulter leur médecin.

Le jour de Noël, la CNAM (Caissenationale d'assurance maladie) annonce qu’elle porte plainte au pénal pour « tromperie aggravée et escroquerie. » Trois jours plus tard ce sont les autorités sanitaire américaines qui font état de « graves violations » dans le processus de fabrication, constatées dès l’an 2000, à la suite d’une inspection de ses enquêteurs dans l’usine en question.

2012. Le 2 janvier, le plus grand distributeur de produits chimiques au monde, Brenntag, admet avoir fourni en quantité du silicone industriel à Poly Implant Prothèse.

Le jour d’après, Xavier Bertrand alors ministre de la santé indique être favorable à l’enquête parlementaire demandée par une député et « demande des enquêtes » à la Direction générale de la santé et à l'Afssaps afin d’évaluer si des défaillances dans les systèmes de contrôle avaient permis à PIP de commercialiser ses prothèses.

Le 6 janvier, Jean-Claude Mas reconnaît lors d’un interrogatoire « Je savais que ce gel n'était pas homologué, mais je l'ai sciemment fait car le gel PIP, rapport qualité-prix c'était moins cher. »

Le 10 janvier, des centaines de Sud-Américaines annoncent se porter partie civile dans l'information judiciaire ouverte à Marseille. Le lendemain, les Pays-Bas recommandent le retrait des implants, suivant l'exemple de la France et de l'Allemagne. 

Jean-Claude Mas, le fondateur de la société PIP, est interpellé à son domicile de sa compagne et mis en examen pour « blessures involontaires » le 27 janvier. L'ancien dirigeant de l'entreprise varoise est laissé libre sous contrôle judiciaire avec l'obligation de verser une caution de 100 000 euros dans un délai d'un an.

Le 6 mars 2012, Jean-Claude Mas est incarcéré à Marseille pour défaut de paiement de caution. Le 16 mars, il fait appel mais une décision de le maintient en détention le 21 mars.

Le 24 mai,  s’ouvre le volet financier de l’affaire. Déjà mis en examen pour « blessures et homicides involontaires », Jean-Claude Mas voit peser sur lui une nouvelle menace judiciaire. Le parquet de Marseille a ouvert une information judiciaire pour abus de biens sociaux, recel d'abus de biens sociaux et banqueroute visant le patron de PIP, mais aussi sa compagne et leur fils. 

Le 12 juillet, cinq cents nouvelles plaintes ont été déposées à Marseille. Au total, ce sont 5.000 plaintes qui ont été déposées en France après le scandale sanitaire des prothèses PIP.

Ce jeudi, la cour d'appel d'Aix-en-Provence se prononce sur une possible remise en liberté de Jean-Claude Mas, après quatre mois et demi passés en prison.