Disney coupable d’espionner ses salariés

Mickey se prend pour 007 et se retrouve sur le banc des accusés. La société Euro Disney, ainsi que deux ex-gendarmes, a comparu hier au tribunal correctionnel de Maux. Plaidant coupable, 100 000 euros d'amande sont réclamés à l'exploitant de parcs de loisirs. Entre 1997 et 2004, Euro Disney a enquêté sur plus de 2 500 de ses employés.

La société au chiffre d’affaires de 1,3 Md€, et comptant 15000 salariés, était en proie à la peur du terrorisme, comme l'a déclaré Gilles Dobelle, son directeur juridique et représentant légal. Le viol d'un jeune visiteur par un employé n'était pas sans jouer un rôle également. C'est pourquoi Euro Disney a décidé d'engager trois militaires retraités (dont l'un est mort depuis) pour enquêter sur les employés à partir de 1997.

Dans l'entreprise depuis 2011, Gilles Dobelle n'avait pas connaissance de ce dossier. Il n'aurait apparamment pas transité par le service juridique. Et dès lors que l'illégalité de l'affaire a été découvert, c'est la société Euro Disney elle-même qui saisit la justice, rappelle-t-il.

Les avocats d'Euro Disney ont indiqué que le « motif de sécurité » de la démarche devait être prise en compte. Ils soulignent que «  si Disneyland Paris était aujourd’hui la cible d’un attentat, les syndicats ne manqueraient pas de venir nous le reprocher ».

Ces mêmes syndicats qui ne ratent pas l'occasion d'émettre leur commentaire sur l'affaire. D'après eux, la recherche de la sécurité ne justifie pas une « atteinte aux libertés fondamentales » telle que celle-ci.

Euro Disney est donc condamné à payer 100 000 euros d'amande. Les gendarmes, eux, écopent de 8 et 6 mois de prison avec sursis.
Si les anciens militaires assument pleinement la recherche et la collecte d'informations sur les employés de manière illégale, ils réfutent les accusations de corruption.

La stratégie d'espionnage

La mission était de fournir des éléments d'information sur les infractions commises par les candidats à l'embauche et les employés en poste. Parfois également d'effectuer des contrôles aux guérites de vérification des badges des employés. Le tout rémunéné 36 000 euros par an.

En 1997, Euro Disney contacte un premier gendarme retraité qui accepte le job. Il recrute l'un de ses amis pour l'aider dans sa tâche et partage la rémunération. Le second gendarme en enrôle ensuite un troisième.

Ainsi, l'équipe avait accès au Stic et au Judex, les fichiers de renseignements de la police et de la gendarmerie. C'est 50 noms par mois qui étaient inspectés au peigne fin. Puis les informations étaient transmises par deux courriers différents (le premier contenant les initiales de l'employé en question, le second les renseignements) à certains cadres de la société.

Un dossier clos ?

Euro Disney pouvait penser que faire amande honorable suffirait à faire boucler l'enquête au plus vite. Ce n'est pas le cas. Certains éléments demeurent mystérieux au sujet de l'affaire.

Les enquêtes vérifiaient jusqu'à l'existence de simples signalements des employés par les forces de l'ordre, ce qui va bien plus loin que la simple peur de la menace terroriste. L'identité de la personne ayant prit la décision de débuter les opérations d'espionnage reste inconnue.

Et, entre les questions sans réponses, l'un des ex-gendarmes a créé la méfiance. Il a déclaré qu'une autre source continuerait de renseigner Euro Disney. La souris aux grandes oreilles dément. Le doute subsiste.