Mauges Communauté : le marché de l’eau potable en question

Mauges

La communauté d’agglomération Mauges Communauté a-t-elle mené l’appel d’offre pour la gestion de son eau potable de manière transparente et démocratique ? C’est le cas sur lequel doit se pencher prochainement le Tribunal Administratif de Nantes dans une affaire qui a vu un concurrent menacer un élu de poursuites pénales en cas d’attribution du marché à la société française Saur. Une tentative d’intimidation face à laquelle Mauges Communauté a fait bloc en défendant fermement la régularité du processus, tout en s’inquiétant du risque judiciaire et de la pression inacceptable subie.

La communauté d’agglomération Mauges Communauté (Maine-et-Loire) se retrouve depuis quelques jours dans une drôle de situation. Alors que le contrat de délégation du service public de l’eau était sur le point d’être attribué à Saur, dont l’offre avait été recommandée par les étapes de sélection technique, on apprend dans le Courrier de l’Ouest du 19 novembre que le conseil communautaire souhaiterait relancer le processus à zéro. Une situation ubuesque, pour un contrat censé démarrer le 1er janvier prochain. En cause d’après le journal, un « simple lien de parenté entre un élu et le salarié d’une entreprise candidate ».

Interrogé par la presse locale, le Président de la Commission de Délégation de Service Public (CDSP), Christophe Dougé s’offusque que cette information fasse l’objet d’une tentative d’exploitation à ce moment du processus, alors que « lorsque la procédure de consultation a débuté, tout le monde savait qu’il y avait un de mes frères qui travaillait dans l’une des entreprises candidate », comme « chef d’équipe, pas dirigeant » et pas dans le secteur des Mauges. Bref, cette relation était connue et transparente, et pas de nature à influer sur les délibérations.

Les liens familiaux dans ce type de contexte local sont une situation banale, qui ne permet pas juridiquement de parler de conflit d’intérêt puisque l’élu en question n’en tire aucun bénéfice et qu’il n’était pas en mesure de peser seul sur la décision. En effet, dans ce type d’appel d’offres, la CDSP statue collégialement, en présence d’un élu de l’opposition, et en donnant un avis non contraignant pour l’autorité concédante qui est seule habilitée à négocier et signer le contrat, après autorisation de l’Assemblée délibérante.

Dès lors, pourquoi un tel revirement ? Parce qu’entre temps, l’un des prétendants – non cité – à cet appel d’offre aurait « approché des élus en évoquant des suspicions de prise illégale d’intérêt », déclare M. Dougé. En clair, un candidat non retenu pour le marché aurait menacé l’élu d’un procès pénal s’ils ne remettaient pas le marché en jeu. Une procédure coûteuse politiquement, même quand son issue ne fait aucun doute.

Pour l’optimiste qui veut voir le verre à moitié plein, ces péripéties témoignent au fond d’un mode de fonctionnement des marchés publiques plus mature, avec des attributions de plus en plus transparentes. Il est légitime que les deniers publics soient dépensés avec précaution, et que les délégataires de service public soient sélectionnés sur leurs seuls mérites. Il est légitime de s’assurer que des liens d’intérêt (directs, indirects, familiaux…) ne sont pas dissimulés, ni ne jouent un rôle dans le choix de tel ou tel prestataire. Et il est rassurant de constater que la prise de décision, partagée entre plusieurs instances, et sous le contrôle démocratique de l’Assemblée délibérante, ne permet plus à un élu seul de favoriser tel ou tel intérêt.

En revanche, il serait dommageable que la culture du soupçon, de la menace voilée et de la diffamation vienne parasiter des assemblées rassemblant des élus locaux qui se battent, dans l’immense majorité, pour la défense des intérêts de leurs concitoyens.  C’est ce qu’a rappelé le Président de la Communauté d’Agglomération, Didier Huchon, déclarant que cette affaire avait été « un moment d’unanimité réconfortant autour d’un élu engagé, responsable et intègre ». Des propos auxquels s’est même associée Laurence Adrien, élue d’opposition, se permettant d’ironiser au passage sur ses propres relations avec Veolia (l’un des candidats) via une « ex belle-sœur ».

Désormais, il appartiendra au Tribunal administratif de statuer sur le dossier : il devra dire s’il considère que la précaution juridique suppose de relancer l’appel d’offre (au risque de créer un précédent en termes d’intimidation des élus), ou bien s’il donne quitus à Mauges Communauté pour sa gestion transparente et démocratique du processus. Décision attendue dans quelques semaines, en espérant un jugement sans eau tiède…

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