Démarchage : « il faut protéger le consommateur »

Christophe Naegelen demarchage

Après s’être attaqué aux appels commerciaux intempestifs, le député (UDI) des Vosges, Christophe Naegelen, dont la proposition de loi visant à encadrer le démarchage téléphonique a été adoptée à l’unanimité à l’Assemblée nationale le 6 décembre dernier, s’intéresse au démarchage à domicile. Entretien.

Pourquoi vous êtes-vous mobilisé sur la question du démarchage téléphonique ?

De nombreux habitants de ma circonscription sont venus m’en parler. Des personnes résidant principalement dans des territoires ruraux, c’est surtout là que les gens sont dérangés. Le démarchage téléphonique dont nous parlons s’apparente à du harcèlement, avec jusqu’à onze, douze, treize appels par jour. C’est un vrai problème. J’ai donc déposé deux propositions de loi visant à encadrer cette pratique, une en début de mandature, et une autre après — car j’ai continué à faire des recherches et j’ai fait évoluer ma position. C’est cette première proposition de loi qui a été adoptée par l’Assemblée, elle sera présentée au Sénat le 21 février prochain.

Quels sont les enjeux liés à l’encadrement du démarchage téléphonique ?

Il existe deux dispositifs légaux en matière de démarchage commercial : l’opt-in et l’opt-out. L’opt-in, c’est le consentement préalable. L’opt-out, c’est le consentement tacite, qui impose une demande explicite du consommateur pour ne pas être démarché. Aujourd’hui, en France, le démarchage téléphonique est autorisé, il faut s’inscrire sur Bloctel [liste d’opposition au démarchage téléphonique] pour ne pas en faire l’objet (opt-out). Certaines propositions de loi demandaient l’inverse, c’est-à-dire à ce que, de facto, tout démarchage commercial par téléphone soit interdit (opt-in).

Problème : le démarchage téléphonique représente à peu près 270 000 emplois en France, il faut garder cette réalité à l’esprit. Par ailleurs, passer à l’opt-in ne résoudrait rien du tout. Pourquoi ? Parce qu’une majorité d’entreprises appellent les consommateurs de manière illégale. Dès lors, si l’on interdit de facto le démarchage téléphonique (opt-in), seules les entreprises qui le font de manière légale arrêteront. Celles qui le font de manière illégale continueront à le faire. Résultat : vous tuez l’emploi et vous ne résolvez rien.

Que préconisez-vous ?

Renforcer le dispositif actuel. Je préconise un opt-out renforcé. Ainsi, nous augmentons les contrôles et les sanctions pour les entreprises qui démarchent illégalement les consommateurs par téléphone, et nous préservons l’emploi. Je milite également pour que les entreprises et les centres d’appel signent une charte de bonne conduite concernant le démarchage téléphonique.

Une fois ce nouveau dispositif en place, les consommateurs pourront dénoncer les entreprises frauduleuses, ce qui permettra aux opérateurs de récupérer les numéros de téléphone suspects et effectuer des contrôles.

La pierre angulaire de ma proposition de loi, ce sont ses articles 7 et 8, qui concernent les appels purement frauduleux, qui représentent entre 20 et 30 % des appels commerciaux. Grâce à cette loi, les opérateurs pourront couper les lignes de ces entreprises qui appellent de manière frauduleuse, chose qu’ils ne pouvaient pas faire avant.

Pour la petite histoire, il y a quelques années, Viva Multimédia, entreprise de démarchage téléphonique frauduleuse, se voit couper sa ligne par Colt, une filiale de SFR. Viva Multimédia décide alors de porter plainte contre Colt et obtient gain de cause : Colt est contraint de rétablir la ligne. Trois ans plus tard, les autorités se rendent compte que Viva Multimédia est bien une entreprise frauduleuse et font couper ses lignes téléphoniques. En 3 ans, Viva Multimédia a réalisé 27 millions d’euros de chiffre d’affaires. À l’époque, le juge n’ayant pas de dispositif légal sur lequel s’appuyer, il a donné tort à l’opérateur (Colt). Demain, si la loi que je propose est mise en application, les opérateurs pourront couper les lignes et le juge pourra s’appuyer sur ces articles pour justifier et approuver cette décision.

Ces derniers mois, le démarchage à domicile est lui aussi dans le viseur des consommateurs. Qu’en pensez-vous ?

S’attaquer au démarchage à domicile sera sûrement la deuxième étape, car on en parle de plus en plus, c’est un sujet important. Dans les deux cas, j’estime qu’il faut protéger le consommateur sans menacer l’emploi. Il est impératif de trouver un équilibre entre le besoin des entreprises d’exercer leur activité, de prospérer, et la protection des consommateurs qui est plus que jamais nécessaire.

Que ce soit pour le démarchage à domicile ou le démarchage téléphonique, le dispositif actuel ne permet pas une bonne protection des consommateurs, le dispositif légal n’est pas assez dissuasif.

Je me suis dans un premier temps attaqué à la question du démarchage téléphonique, car ce problème m’a été remonté dans ma circonscription, mais celle du démarchage à domicile est tout aussi importante et s’intéresser à son encadrement, toujours dans la volonté de protéger le consommateur, est la suite logique de ma démarche.

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