Alors que le gouvernement souhaite « apporter des réponses à la crise sociale que la France a connue », certains amendements proposés par la majorité s’attaquent au commerce en ligne au nom de l’équité et de la protection de l’environnement.
Conçu comme un acte politique en réponse aux manifestations des gilets jaunes, le projet de budget pour 2020 devait faire la part belle aux mesures en faveur du pouvoir d’achat et de la justice fiscale. Et en la matière, aucune piste n’est à négliger. Le gouvernement prévoit notamment une baisse de 5 milliards d’euros de l’impôt sur le revenu et la poursuite de la suppression de la taxe d’habitation. Sans oublier le retour de la défiscalisation des heures supplémentaires ou encore la suppression de 18 petites taxes. Au total, le gouvernement souhaite entériner plus de 9 milliards d’euros de réduction de prélèvements pour les Français.
Mais certains membres de la majorité veulent aller encore plus loin. Les députés Emilie Cariou, Matthieu Orphelin et Delphine Batho ont notamment présenté un amendement afin de soumettre à la taxe sur les surfaces commerciales (Tascom) les entrepôts et centres logistiques qui actuellement n’en sont pas redevables tout en ayant « un impact négatif sur l’étalement urbain ».
« Corriger l’iniquité fiscale »
Contrairement aux hypermarchés ou supermarchés, les entrepôts ouverts par les acteurs du e-commerce afin de stocker leurs marchandises avant livraison ne sont pas soumis à la Tascom, ce qui favorise l’artificialisation des sols. Or, alors que les ventes sur Internet ont progressé de 13,4 % en 2018, les députés craignent que l’impact négatif d’une course aux mètres carrés disponibles ne s’accroisse, au détriment des établissements vendant des produits au détail.
L’équilibre entre les commerces de centres-villes et les géants du numérique préoccupe également le député Benoît Potterie, qui propose, lui, un amendement visant à instituer « des mesures en faveur de certaines catégories de commerçants et artisans âgés ».
Le député LREM souhaite en effet mettre en place une taxe sur la livraison d’une commande en ligne faite à domicile. Elle serait d’environ 1 euro pour une commande de moins de 100 euros, 2 euros pour une commande comprise entre 101 et 1 000 euros, et 5 euros au-delà.
Puisqu’il s’agit de « corriger l’iniquité fiscale entre les différentes formes de commerce », cette taxe ne s’appliquerait pas aux consommateurs qui font le choix d’aller chercher leur colis à la Poste ou chez un commerçant appartenant à un réseau relais. Les communes de moins de 20 000 habitants seraient également exemptées, ceci « afin de ne pas créer de disparités envers les territoires ruraux ne disposant pas de points de retrait ».
« Des réponses à la crise sociale »
L’amendement proposé par Benoît Potterie aurait également un impact bénéfique sur l’environnement, le consommateur étant incité à retirer son colis dans un point physique évitant ainsi « une livraison parfois superflue ».
Cela tombe bien pour le gouvernement qui, outre les questions du pouvoir d’achat, de la justice fiscale et du social, veut se montrer exemplaire en matière environnementale. Il peut compter pour cela sur un amendement – également proposé par Emilie Cariou – visant à taxer plus fortement les SUV et autres véhicules lourds, ou encore sur celui présenté par Bénédicte Peyrol, qui souhaite obtenir une évaluation de l’impact de plusieurs dispositifs immobiliers afin de « rendre plus cohérents les dispositifs fiscaux français avec ses engagements environnementaux ».
« Un budget est un acte politique. En 2020, nous apportons des réponses à la crise sociale que la France a connue et au ralentissement de l’économie mondiale », affirmait récemment Bruno Le Maire. L’Assemblée nationale dispose d’environ trois mois pour dire si le ministre de l’Economie avait raison.