Finalement, Jérôme Cahuzac s’en sort plutôt bien

Le déferlement médiatique qu'a déclenché l'affaire Cahuzac se comprend facilement. Un ministre délégué au budget engagé dans la lutte fiscal pris la main dans le sac, ça fait mauvais genre. Pour autant, les réactions du coté de la classe politique comme de l’opinion publique, n’ont pas versé dans la condamnation morale  à outrance. Aujourd’hui Jérôme Cahuzac prépare même son retour.

Quand l’affaire Cahuzac a éclaté, les commentaires ont pour la majorité été teintés d’une certaine prudence. Les publications d’Edwy Plenel  ont d’abord suscité un certain scepticisme du coté des journalistes tandis que la classe politique, en particulier du coté de l’opposition, ne s’est pas ruée dans le boulevard qui s’ouvrait devant elle.

Oui, nous pouvons dire aujourd’hui que Jérôme Cahuzac a été épargné dans une certaine mesure. les Français ont préféré ne pas se mêler de ce qui regardait la justice et ont respecté la présomption d'innocence. L’ex ministre délégué au budget n'a apparemment été que relativement traumatisé puisqu'il envisage même aujourd’hui  de poursuivre sa carrière politique.

Après s’être excusé publiquement dans une intervention télévisuelle contrite le 16 avril ou cours de laquelle il a renoncé à son mandat parlementaire « en raison de l’ampleur de la faute morale commise », l’ancien ministre délégué au budget se plait aujourd’hui à entretenir le suspense sur sa candidature à sa propre succession à la législative partielle de la troisième circonscription du Lot.

Si sa candidature est jugée indécente par la classe politique, elle aurait néanmoins quelques chances de déboucher sur une réélection. Jérôme Cahuzac bénéficierait en effet d’un soutien local certain dans l’arrondissement. Son apparition au marché de Villeneuve-sur-lot  le 11 mai lui a valu un accueil plutôt cordial.

En attendant, la commission d’enquête parlementaire auditionne différents ministres susceptibles de déterminer s’il y a eu d’« éventuels dysfonctionnements dans l’action de l’Etat du 4 décembre 2012, date à laquelle Mediapart a fait ses premières révélations sur le compte suisse de l’ancien ministre délégué au Budget.

Il semblerait qu’il n’y ait pas qu’en politique que Jérôme Cahuzac bénéficie d’une certaine indulgence. L’Ordre des Médecins, qui devait se prononcer sur sa radiation, attend finalement que les preuves soient faites sur les versements illégitimes dont a bénéficié l’ancien ministre. Une position qui s’appuie sur l’idée que la justice est la seule habilitée à délivrer un jugement quel qu’il soit.

Une prudence également justifiée par l’existence de certaines lois, par ailleurs renforcées ces dernières années, pour « sécuriser et encadrer, année après année, le champ d’intervention des entreprises du médicament auprès des décideurs publics et des professionnels de santé ». Il s’agit entre autres de la loi anti-cadeaux de 1993 ou encore la loi dite « Bertrand » qui réglemente aussi la transparence des liens avec les experts.

Jérôme Cahuzac bénéficie de la prudence généralisée d’une France qui a décidé de ne pas céder à la vindicte facile. Il ne faudrait pas que ce comportement d'une sagesse presque anormale débouche sur un impuni.