Moukhtar Abliazov mis en examen pour détournements de fonds

L’imbroglio juridico-diplomatique autour de la personne de Moukhtar Abliazov, milliardaire kazakh, connaît un nouveau rebondissement avec sa mise en examen par un juge d’instruction français saisi par le Parquet de Paris, quelques jours après que l’oligarque a obtenu son statut de réfugié politique en France par la Cour nationale du droit d’asile (CNDA), initialement refusé par l’Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA). Moukhtar Abliazov est accusé par la banque kazakhe BTA d’une gigantesque escroquerie d’au moins 6 milliards de dollars.

Celui qui aime cultiver une image d’ « opposant politique » et de victime de régimes «autoritaires» sur Facebook pourrait bien n’être qu’un criminel financier de haut vol. « Abus de confiance aggravé », « blanchiment aggravé », le juge d’instruction français estime que de forts indices d’existence d’infractions sont présents dans le dossier de Moukhtar Abliazov, milliardaire kazakh en fuite de son pays depuis 11 ans et poursuivi par le Royaume-Uni, la Russie, l’Ukraine et le Kazakhstan pour des sommes avoisinant les 6 milliards d’euros.

« Extrader ou juger » Moukhtar Abliazov

Dès 2009, Moukhtar Abliazov est en cavale et se réfugie à Londres. Son ancienne banque engage des actions civiles contre lui : n’exécutant pas les décisions des juges, il est condamné à 22 mois d’emprisonnement pour outrage au tribunal (« contempt of court »). Il fuit le Royaume-Uni qui lui demande le paiement d’un montant de 4 milliards de dollars américains de dommages et intérêts au profit de la banque kazakhe BTA, dont il était président du Conseil d’administration de 2005 et 2009 avant sa nationalisation en 2009. Réfugié en France, il est arrêté en 2013 dans une villa cossue de la Côte d’Azur sur une demande d’extradition formulée par la Russie. Au total, ce ne sont pas moins de trois pays qui demandent son extradition.

Arrêté le 5 octobre dernier à partir d’une plainte déposée en 2017, Moukhtar Abliazov est notamment visé par une disposition du code pénal français qui prévoit qu’un tribunal peut juger un étranger, dont l’extradition a été refusée pour différents motifs, notamment politiques, pour un crime ou un délit commis hors de l’Hexagone. Les autorités françaises sont en effet compétentes pour juger l’affaire d’après un principe de droit international (« extrader ou juger »), une disposition du Code pénal (article 113-8-1) qui évite que les personnes ayant commis des infractions restent impunies.

La thèse de la chasse à l’homme mise à mal

Cette affaire hors-norme mêle deux actions parallèles en cours aujourd’hui : d’une part, une action administrative qui fait intervenir l’Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA). L’OFPRA a refusé à M. Abliazov le statut de réfugié en 2018. Alors que l’oligarque de 57 ans est inquiété par de nombreuses juridictions, la Cour nationale du droit d’asile a finalement infirmé la décision de l’OFPRA le 29 septembre dernier.

D’autre part, l’oligarque est sous le coup de poursuites judiciaires pour les détournements dont il serait l’auteur au sein de la banque BTA, qui souhaite obtenir gain de cause. Détenant de très importants moyens financiers, l’ex-banquier kazakh a réussi à se construire une image d’opposant politique et obtient même du Conseil d’Etat, défenseur des libertés publiques, l’annulation de l’extradition vers la Russie, contre l’avis de nombreuses juridictions avant lui, notamment celui de la Cour de cassation.

Le Conseil d’Etat, seul contre tous ?

Aujourd’hui, le statut de réfugié de Monsieur Abliazov ne devrait pas avoir d’incidence sur l’instruction en cours. Le Parquet de Paris a décidé de travailler sur les éléments d’infractions économiques en saisissant un juge qui a la tâche d’étudier les supposées preuves de détournement de fonds de la Banque par le milliardaire et les faits de blanchiment en France.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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